En ce début d'année, le Couvent du Nord vous souhaite une année aussi réjouissante que notre météo actuelle : brumeux le matin pour mieux rayonner ensuite ! Que la seule vague que vous dussiez affronter soit d'amour et de paillettes et que vous puissiez vous amuser avec vos proches ! Vos pintades bien aimées
Les Sœurs de la perpétuelle indulgence du Couvent du Nord ont hésité à vous ressortir le discours de l'année dernière, tant peu de choses ont changé depuis 2020. À l’époque, Élisabeth Moreno recevait le STRASS. L’espoir d’un changement était faible et la ministre a effectivement tenu ses promesses décevantes : rien n’a changé, tout a continué.
En ces temps d’élection présidentielle, chaque candidat·es a été interpellé·e pour savoir s’iel s’engagerait sur les droits des TDS. On peut dire que ça ne s'est pas pressé au portillon du bordel – autogéré – pour se positionner. Des entrevues qui se soldent par des attentes, des promesses en privée qui se dérobent en public, à nouveau, les TDS sont traité·es en pestiférés. La seule position qu’on accepte et qu’on attend d’elleux, c’est celle de la victime manipulée par un mac, repentante de son travail. Toute autonomie leur est enlevée et les concerné·es revendiquant leur droit sont insulté·es, harcelé·es et menacé·es, comme s’iels niaient la réalité de la prostitution forcée, alors qu’iels la combattent et demandent des moyens pour lutter contre elle. Au lieu de cela, l’État n’émet que des lois putophobes. Chaque année on constate l’inefficacité de la loi de pénalisation des client·es de 2016, pire elle précarise les TDS. Réaffirmons-le, la putophobie tue. Nous aimerions nous retrouver ensemble pour célébrer uniquement notre joie militante et non pas devoir commémorer celleux qui nous ont quitté trop tôt. Tant que ces violences persisteront, il sera utile de rappeler les outils mis à disposition des concerné·es, par des concerné·es, à savoir le fantastique travail du STRASS, qui possède un service juridique, ou le CAARUD Entr'actes, dans le Vieux-Lille, qui fournit outils de réduction des risques et d'hygiène, soutien et humanité. En attendant, le Couvent du Nord souhaite rendre honneur à nos adelphes qui triment sur les pavés en talons dans le froid, qui tentent de trouver le bon angle devant leur caméra, qui sont épuisé·es après les heures de tournage et les TDS d’un soir pour payer une facture de trop. Vous nous êtes précieux·ses, vous êtes merveilleux·ses et vous trouverez toujours sous nos cornettes une oreille, une capote ou une paillette à dépanner. Nous continuerons de marcher avec vous jusqu’à l’obtention du droit commun et pour ne pas oublier nos militant·es disparu·es. Aujourd’hui, nous commémorons les folles trop efféminées qu’on a tenté de rééduquer, les femmes qu’on a déclaré frigides parce qu’elles n’étaient pas attirées par les mecs, les personnes trans qu’on a voulu ré-assigner dans leur « vrai sexe » et tou·tes les membres de nos communautés LGBTQI+ qu’on a psychiatrisé parce qu’iels ne rentraient pas dans le cadre de la société hétéropatriarcale.
Il y a seulement 21 ans, le 17 mai 1990, l’OMS retirait l’homosexualité des maladies mentales. Pour nos adelphes trans, pourtant pionnie·res de nos luttes, c’est seulement en 2019 que le retrait a eu lieu. Souvenons-nous que nos acquis sont récents, fragiles et, malheureusement, si faciles à perdre. Nous devons nous unir pour ne pas oublier celleux qu’on a envoyé en thérapie de « conversion », celleux qu’on a interné pour leurs amours, celleux qu’on a médicamenté de force pour silencier leurs identités, celleux qu'on a jeté dans la rue, qu’on a battu, poussé au suicide, mutilé, assassiné. Notre devoir de mémoire est d’autant plus fort que ces violences se perpétuent encore dans certains pays. En France, plutôt que d'interdire définitivement les thérapies de conversion, Élisabeth Moreno a préféré se contenter d'une simple circulaire à valeur consultative. En attendant, tu le sais déjà chaton, tu es aussi précieux·ses qu’un pavé en manif, et Sainte-Pouffe sait que nous en aurons besoin dans les mois à venir. Les mois des fiertés arrivent, le soleil revient. Il est grand temps de montrer à quel point nous sommes flamboyantes, peu importe notre orientation sexuelle, notre identité de genre, nos corps, qui sont variés et multiples. Nous sommes des petits poneys pailletés et nous ne demandons qu’à briller ! Les beaux jours reviennent, les lipsticks en fleurs sont de sorties, les butchs lustrent une dernière fois leur camion et l’ensemble du Gouinistan est en ébullition, pas de doute, c’est aujourd’hui la journée de visibilité lesbienne !
À toutes nos puces qui dégustent les moules ou qui préfèrent les frites, même celles qui aiment les frite-moules, celles qui s’en fichent de ce qu’il y a, tant qu’elles aiment, et celles qui aiment, tant qu’il le faudra. Pour celles qui sont dans le placard, qui y ont le cafard mais qui savent qu’elles s’épanouiront tôt ou tard. Pour celles qui sont tartes mais après tout, avec son chou à la crème, est-ce qu’on n’est pas toujours tarte à la crème ? Pour les gousses vieillissantes et les jeunes qui se sentent goudous, mais aussi celles qui rêvent d’être Amandine Gay, mais qui hésitent à se dire gay. Aussi à vous qui débutez les hormones et aux autres qui composent avec leur progestérone. Et après tout, entre gouines, on s’en fout, tant qu’il y a de la solidarité entre nous et qu’on bat le pavé ensemble pour la PMA pour tou·tes, comme ce dimanche à Paris, et qu’on lutte contre les fachos, comme à Lyon samedi ! Vous avez la flamboyance d’Adèle Haenel, la conviction d’Angela Davis, la prestance de Karine Espineira et tant d’autres icônes, de Monique Wittig à votre voisine ! Autant de portraits de lesbiennes en feu que nous voulons voir irradier jusqu’à nos retrouvailles en 2022 (ou avant, on brûle des encens à la lavande pour ça) ! En attendant, remettez Mécano, réécoutez les albums d’Aloïse Sauvage, affichez vos plus beaux posters d’Hoshi et retrouvez-vous en toute sororité ! Aux environs d’avril 1945, l’ensemble des camps de concentration et d’extermination nazis sont libérés. Les survivant·es qui reviendront chez elleux s’enfermeront dans le mutisme, souvent provoqué par un manque d’écoute. En 1954, une première journée nationale du souvenir de la déportation est mise en place. Les cérémonies se déroulent, les associations d’ancien·nes déporté·es pleurent et honorent les communautés juives, résistantes, politiques, etc. Mais c’est seulement 41 ans plus tard, en 1995, que Jacques Chirac reconnaîtra le rôle actif de la France dans la déportation de ses citoyen·es (comme quoi il n’aura pas dit que des saloperies).
Une parole est tue encore plus longtemps, c’est celle des déporté·es gays et lesbiennes, avec leur triangle rose et leur triangle noir. Dès 1991, les Flamands roses sont la première association LGBT+ à affirmer l’existence de la déportation en France pour motif d’homosexualité. Iels sont présent·es chaque année, mais ont longtemps été tenu·es à l’écart de la cérémonie officielle, avant d’y être intégré·es avec d’autres associations LGBT+. En 1995, le témoignage de Pierre Seel, seul français déporté pour motif d’homosexualité à avoir témoigné, confirmera que leur combat est utile et nécessaire pour que ces femmes et hommes ne soient pas silencié·es à nouveau. En 2021, pour la première fois, une institution officielle consacre une exposition à la déportation des LGBT+ en Europe, au Mémorial de la Shoah à Paris. Nos adelphes regagnent une voix, une visibilité et une dignité. Des initiatives militantes permettent également de réincarner ces destins durant le conflit, tel Queer Code. Nous nous réjouissons que le vœu de mémoire se perpétue, tisse des liens entre notre passé et notre présent et que chacun·e puisse commémorer ces oublié·es de l’Histoire. Nous regrettons hélas que tous les camps n’aient pas été abolis, que ce soit pour homosexualité/transidentité en Tchétchénie, les Ouïghours en Chine et tant d’autres. Nous ne les oublions pas et nous ne les oublierons jamais. VOUS ÊTES MERVEILLEUX·SES ET FABULEUX·SES ! DES BISOUS ET À TANTÔT !
Votre Couvent du Nord qui vous aime encore plus que le chocolat Ah, Sainte-Pouffe nous souffle dans la cornette qu’on peut faire mieux, parce que vous le valez bien. Alors, à vous nos cher·es adelphes trans, nous vous souhaitons le meilleur en cette journée de la visibilité trans et tout le reste de l’année aussi ! Que vous soyez en questionnement, que vous rayonnez sur les chars de l’Existrans ou que vous viviez dans une ferme du Cantal, toutes vos existences, vos vies, vos vécus sont valides. Soyez fier·e de vous et de qui vous êtes. Nous trépignons d’impatience de pouvoir vous retrouver, pour vous couvrir de nos paillettes et de nos bisous, en espérant que nous ne créerons qu’un cluster d’amour autour de nous, tellement vous nous aurez trans-porté de joie ! Et, en attendant de danser tou·tes ensemble, continuons de tisser des liens de solidarité entre nous et de nous célébrer dans la diversité de nos genres et de nos corps. Nous avons eu avant-hier l’immense horreur d’écouter l’historienne et psychanalyste Elisabeth Roudinesco, invitée par Quotidien à s’exprimer sur les dérives identitaires, donner son avis sur « les dérives de genre » dans nos sociétés.
Dans son discours, Mme Roudinesco n’est pas très originale : ses arguments sont ceux qu’on nous ressert à toutes les sauces et qui ne font que prouver un manque d’éducation aux problématiques LGBTQIA+. Elle mélange allègrement sexe, genre et orientation sexuelle/romantique ; elle invisibilise l’intersexuation ; elle perpétue l’idée fausse que la communauté trans* cherche à abolir le concept de sexe biologique ; elle réduit la transidentité à « un changement de sexe » qui induit obligatoirement des thérapies hormonales lourdes et des opérations, ce qui lui permet ensuite de parler, vous l’attendiez, des enfants qu’il faut protéger. (« Maintenant, on a supprimé la différence anatomique au nom du genre. […] Vous vous sentez tout ce que vous voulez : vous êtes bisexuel·le·s, vous êtes fluide, vous êtes tout ça… mais reste qu’il n’y a pas de troisième sexe. […] Ça a été abandonné, cette idée de faire changer de sexe des enfants prépubères avec des traitements. ») Mais la cerise sur le gâteau, c’est bien ça : « Je trouve qu’il y a un peu une épidémie, aujourd’hui, de transgenres. Il y en a beaucoup trop… ». On notera tout d’abord la délicatesse du terme « épidémie de transgenres » alors que la transidentité n’est en aucun cas une maladie et que nous sommes au beau milieu d’une pandémie bien réelle et meurtrière. Cette rhétorique dangereuse promeut l’idée de la transidentité comme pathologie contagieuse qui détruit les corps et la société – argument favori des féministes transphobes. Et puis ensuite… « beaucoup trop » ? Beaucoup trop de quoi ? De personnes qui se sentent enfin libres d’être elles-mêmes, de s’exprimer comme elles le souhaitent, de revendiquer leur existence, leur légitimité, leurs droits fondamentaux ? Nous sommes attristées et révoltées de voir Mme Roudinesco, figure de l’engagement contre le colonialisme, l’antisémitisme et l’homophobie, tenir un discours aussi réactionnaire, blessant et dangereux. Réactionnaire parce qu’il diffuse une vision éculée et des idées fausses, blessant parce qu’il déshumanise, dangereux parce que la déshumanisation rend légitime la violence et la discrimination. Et toutes ses tentatives de nuancer son propos ne changeront rien au mal qu’elle a fait. « Il ne faut pas les discriminer »: encore heureux, Elisabeth, mais la prochaine fois essaye de suivre tes propres conseils, car la transphobie tue. Cela fait sept ans que Kay s’appelle Kay. Sept ans, l’âge de raison… C’est beaucoup – un peu moins d’un tiers de sa vie. Mais il semblerait que sept ans, aux yeux de l’État français, ce ne soit rien, car Kay se bat depuis 2019 pour obtenir son changement de prénom. Sa démarche lui a été refusée au prétexte que sa demande n’était pas légitime. Sept années de courriers, de factures, de diplômes, de cartes bancaires, d’ami·e·s et de famille utilisant votre nom et vos pronoms, pas légitimes ? Sept années de vie, d’expériences, d’existence, pas légitimes ?
Le cas de Kay n’est malheureusement pas isolé. Notre belle fRance ne manque jamais une occasion de rappeler qu’elle est « le pays des droits de l’Homme* » (*offre soumise à conditions)… mais les droits des femmes et des personnes transgenres, où sont-ils? Ce qui est intolérable, c’est la transphobie d’État, la violence administrative, la discrimination quotidienne qui prive nos concitoyen·ne·s trans* de leurs droits les plus fondamentaux. Le Couvent du Nord des Sœurs de la Perpétuelle Indulgence joint sa voix à toutes celles qui dénoncent les identités niées, les libertés bafouées des personnes transgenres et non-binaires. Kay – sache que tes petites Sœurs t’admirent, t’aiment et te soutiennent dans ton combat qui est celui de centaines, de milliers de nos adelphes. Ton courage nous rend courageuses, ta lumière nous rend lumineuses, car nous sommes le miroir de nos communautés. Cher Guillaume,
Tu avais 20 ans. Tu étais plus jeune que notre ordre, que notre Couvent, que n’importe laquelle d’entre nous. La logique aurait donc voulu que nous arrivions avant toi au Paradisco, où nous t’aurions préparé une fête digne de ce nom, mais tu nous as devancé. Fin janvier, tu as eu le courage de raconter ton viol, de dénoncer tes agresseurs, dont Maxime Cochard, conseiller PCF à la Mairie de Paris, qui n’a eu pour unique réponse que de porter plainte pour diffamation. Cette mairie qui est décidément bien accueillante avec ses agresseurs, puisque Christophe Girard, accusé d'agression sexuelle, et soutient de l'écrivain pédophile Gabriel Matzneff, a repris son poste en décembre, alors qu’Alice Coffin, qui a pris position contre Christophe Girard, a elle bien été lynchée sans excuse. Mais toi, lorsque tu as parlé, tu as été une étincelle pour des milliers avec le #MeTooGay. Tu es devenu notre jeune homme en feu et c’est ce portrait que nous voulons garder de toi. Celui d’un militant radical, prêt à soulever les foules. Parce qu’il faut souligner ta dernière action avec tes potes, pas la moindre : grâce à votre rage et votre amour, vous avez mobilisé 4000 personnes sur le parvis de cette mairie honnie pour dire oui à la PMA pour tou·tes et ça, c’est sublime. Si aujourd’hui nous te pleurons, nous savons que demain nous nous retrouverons. Alors, muni de la couronne de lumière que tu portais à noël, nous espérons que tu sauras nous faire un accueil dont Sainte Pouffe se souviendra pour longtemps. Nous poursuivrons le poing levé, ensemble pour te célébrer, pour que les victimes ne soient plus silenciées et que les agresseurs cessent de triompher. Chéri·e darling, tu es encore là pour nous lire ? Mais c’est merveilleux ! Tu as réussi le plus grand des exploits : nous gratifier de ta présence une année de plus !
On a un peu tardé pour les vœux, car on voulait voir de quoi il en retournait avant de s’avancer. Y’a pas à dire, en une semaine, 2021 se démène comme un beau Valls ! On n’a pas le cul sorti du gang-bang, comme le disaient nos vieilles tantes, mais elles ajoutaient : ne nous laissons pas démonter ou bien avec consentement ! Tout comme Régine, on en rêve de la boule au plafond, mais à défaut de pouvoir retourner à la vie non-essentielle pour le PIB (mais si sacrée pour notre santé mentale) recrée tes espaces queer-safe-cocooning autour de toi. Les pyjamas parties ne sont pas interdites et rien ne vaut une bonne raclette (option végé possible) pour se retrouver ! Et si c’est plus Juliette Gréco que Tata Yoyo au niveau du moral, ne reste pas seul·e. Nous pensons notamment aux étudiant·es, dans leurs chambres, qui sont confronté·es à leur écran et leur solitude, parfois dans une très grande précarité. Nous n’oublions par les travailleur·ses mobilisé·es sur leur lieu de travail alors que le distanciel serait possible. Nous soutenons sans relâche les acteur·trices de la culture, dont on chante les louanges à longueur de temps mais qu’on a préféré empailler depuis un an. Nous avons pour chacun·e de vous, oublié·e par le Gouvernement, une pensée d’amour, mais aussi de rage face à leur inaction. Nous leur sonnons les cloches depuis des mois, mais la période a dû leur faire croire qu’il s’agissait de la messe de minuit. En attendant, chères ouailles, n’oubliez pas que vos Sœurs et Gardes sont là, masquées, mais toujours prêtes à vous aimer et que surtout, surtout ! vous êtes beaux·belles et merveilleux·ses ! Votre Couvent du Nord, de démentes et religieuses. |